Le cabinet Grand View Research estime que le marché mondial des exosquelettes dépassera les 2,7 milliards d’euro en 2025.
Les recherches américaines bénéficient largement des subsides de la Défense et de la NASA. Le marché de l’exosquelette est actuellement centré autour de quelques acteurs majeurs, tels que ReWalk, Ekso Bionics, Cyberdyne et Lockheed Martin. Le vieillissement de la société japonaise créera un des marchés principaux en Asie. Les scientifiques européens fédèrent leurs travaux autour du projet Robo-Mate.
S’il est légitime de penser aux Etats-Unis ou à la Corée du Sud quand on parle d’exosquelette, les entreprises et les chercheurs français sont de plus en plus présents sur cette technologie d’avenir. Planète Robots vous présente aujourd’hui quatre projets.
L’équipe SIRIUS autour de l’assistance à la personne
Dans un contexte d’une société vieillissante, le développement des exosquelettes vise principalement deux champs applicatifs : l’assistance pendant les activités quotidiennes et la rééducation.
L’équipe SIRIUS (Systèmes Intelligents, RobotIqUe ambiante et de Service) du laboratoire LISSI (Laboratoire Images, Signaux et Systèmes Intelligents), de l’université de Paris-Est Créteil (UPEC) travaille sur ces sujets depuis dix ans, en se positionnant sur l’assistance physique à la personne en exploitant des robots portables. Leur propos est de préserver les mouvements naturels du l’humain, ce dernier devant en rester maître.
Les chercheurs ont développé des modèles musculo-squelettiques et des techniques d’automatique avancée pour estimer l’intention de l’humain et contrôler le robot dans l’optique d’une interaction symbiotique entre l’humain et le robot.
L’aventure a commencé en 2008, avec le développement de l’orthèse du genou EICOSI (Exosquelette Intelligent et Communicant Sensible à l’Intention), en considérant les mouvements de flexion/extension d’un humain en position assise. Dans ces travaux, l’intention de l’humain est estimée à partir de l’activité électrique des muscles (capteurs EMG) agissant sur l’articulation du genou. Différents modes d’assistance ont été étudiés allant d’une assistance complète (humain passif) à une assistance adaptée aux capacités motrices de l’humain.
Ce travail de base sur une structure simple a conduit SIRIUS sur un projet plus ambitieux : un exosquelette de la partie inférieure du corps, pour les activités quotidiennes, appelé EROWA (Exoskeletal Robotic Orthosis for Walking Assistance). Le système se veut complètement autonome, avec une batterie d’une autonomie d’une heure trente. La partie mécanique a été développée en Corée du sud, dans le cadre d’un projet de recherche PHC STAR Franco-Coréen. L’exosquelette est également adapté pour de la rééducation avec des béquilles. Il a été conçu pour des sujets ayant des capacités motrices limitées.
Pour améliorer la transparence et l’acceptabilité de l’exosquelette, les chercheurs de l’équipe SIRIUS ont également développé une approche de compensation de l’impédance mécanique induite par l’exosquelette. Grâce à cette approche, l’activité musculaire humaine a pu être réduite de 50% dans le cas de mouvements de flexion/extension des genoux et de 12% dans le cas d’un transfert assis-debout.
L’équipe travaille également sur un prototype d’exosquelette de l’articulation de la cheville, en partenariat avec le service Service de Rééducation Neurolocomotrice du CHU Henri Mondor.
Les chercheurs s’intéressent actuellement à l’adaptation de l’assistance apportée à l’humain en fonction du contexte (marche sur sol plat, montée, descente d’escaliers, etc.). Ces travaux s’appuient sur l’analyse en temps réel du cycle de marche en utilisant des centrales inertielles portables.
Au CEA, des exosquelettes de port de charge
Le premier projet d’exosquelette du laboratoire de robotique interactive du Commissariat à l’Energie Atomique (CEA) date de 2005, avec le projet d’un bras motorisé à retour d’effort, ABLE, en collaboration avec Haption.
Par ailleurs, les chercheurs travailleront au projet Hercule avec RB3D et au projet EMY. Du fait du domaine d’action du laboratoire, l’effort de recherche a été axé sur l’assistance au port de charge.
La finalité de l’actionnement en robotique est la conversion d’une énergie électrique en une énergie mécanique. Cette loi de transformation n’est pas parfaite : c’est un des sujets de recherche au Laboratoire de Robotique Interactive du CEA.
Classiquement la transmission se fait principalement par engrenage, induisant des frottements et imposant un positionnement géométrique parfait des pièces pour assurer un rendement élevé, et finalement difficilement compatible avec un usage dynamique.
Pour répondre à cette problématique, les mécaniques du CEA utilisent des vis à billes, pour mettre à profit le roulement (plutôt qu’un glissement d’engrènement), pour diminuer les frottements, et permettre une architecture élancée.
L’exosquelette des membres supérieurs ABLE a ainsi poursuivi son développement, passant progressivement d’un prototype à 4 axes de mouvement en 2005 à 7 axes et à des travaux communs avec Haption et PSA.
Il trouve application aussi bien en rééducation qu’en assistance dans l’industrie pour l’aide aux opérations bras levés.
Par ailleurs, le CEA de Grenoble travaille au projet BCI à Clinatec. Il s’agit d’implanter un capteur à la surface du cerveau d’un patient tétraplégique pour lire ses intentions de mouvement. Ce principe avait besoin d’un effecteur pour démontrer ses possibilités : l’exosquelette quatre membres EMY a été conçu dans ce but.
Il fait maintenant l’objet d’évaluations, avec un patient implanté en juin.
Pour la suite, les chercheurs souhaitent ajouter une fonction de préhension et une d’assistance à l’équilibre.
Dans le cadre de l’aide au port de charge, le CEA a développé en collaboration avec RB3D l’exosquelette Hercule, qui a rencontré un vif succès.
Le principe de développement fut d’intégrer un minimum d’actionneurs nécessaires au port d’une charge, soit quatre assurant flexion/extension des hanches et genoux.
D’autre part, l’exosquelette de laboratoire EMY-BALANCE contribue à des travaux sur la reprise d’équilibre pour un utilisateur valide, cette fois avec 4 actionneurs par jambe.
[…] L’article dans son intégralité est paru dans Planète Robots n°50 du 1er mars 2018